Adoption de la loi relative au renforcement de la sécurité de l'usage des drones civils
La loi n°2016-1428 du 24 octobre 2016 relative au renforcement de la sécurité de l'usage des drones civils a été publiée au Journal officiel du 25 octobre 2016. Introduisant une meilleure réglementation de l'usage des drones civils en France, celle-ci vise à responsabiliser les usagers de drones et à prévenir les usages indésirables, sources d'insécurité.
Phénomène nouveau et en plein essor, l'usage massif des drones civils a rapidement été à l'origine de divers incidents de sécurité, allant du survol illégal de sites sensibles français à des vols de drones à proximité des avions, manquant de peu la collision.
Face à de telles situations d'insécurité et en l'absence de normes internationales et européennes, la France a mis en place une première réglementation en 2012 visant à encadrer l'évolution des drones civils dans l'espace aérien à travers deux arrêtés, par la suite modifiés en décembre 2015[1].
Souhaitant aller plus loin dans le renforcement du dispositif légal, deux sénateurs, Xavier Pintat et Jacques Gautier, ont déposé au Sénat le 25 mars dernier un projet de loi sur les drones civils aériens, adopté en première lecture par le Sénat, avec modifications, le 17 mai. Transmis à l'Assemblée nationale, celle-ci l'a à son tour adopté, avec modifications, le 27 septembre. Finalement, le 13 octobre dernier, le Sénat a adopté le texte de loi définitif, sans modification. La nouvelle loi a ensuite été publiée au Journal officiel le 25 octobre.
Le texte de loi adopté, comprenant six articles, durcit la législation actuelle tant à l'égard des fabricants que des utilisateurs de drones civils.
Pour rappel, un drone aérien est un aéronef, défini par l'article L6100-1 du Code des transports, comme « tout appareil capable de s'élever ou de circuler dans les airs ». Il s'agit plus précisément, selon les termes employés par les arrêtés de 2012 et 2015 mais également par la loi nouvelle, « d'aéronefs circulant sans personne à bord et opérés par un télépilote ». L'article 2 de la loi adoptée précise ce que l'on entend par « télépilote ». Le télépilote est « la personne qui contrôle manuellement les évolutions d'un aéronef circulant sans personne à bord ou, dans le cas d'un vol automatique, la personne qui est en mesure à tout moment d'intervenir sur sa trajectoire ou, dans le cas d'un vol autonome, la personne qui détermine directement la trajectoire ou les points de passage de cet aéronef ».
Ainsi, bien que l'engin ne soit pas habité, la personne humaine tient une place essentielle dans le système de fonctionnement et de direction du drone.
La loi du 24 octobre 2016 relative au renforcement de la sécurité de l'usage des drones civils renforce tout d'abord les obligations pesant sur les fabricants de drones civils. Ceux-ci sont désormais tenus à une obligation d'immatriculation et d'enregistrement des drones.
Dans son article premier, la loi rappelle que les aéronefs circulant sans personne à bord et dont la masse n'excède pas 25 kilogrammes ne sont pas soumis à l'obligation d'immatriculation. L'obligation d'immatriculation ne concerne ainsi que les engins les plus lourds.
Cependant, la loi introduit une nouvelle obligation d'enregistrement concernant les drones dont la masse est supérieure ou égale à un seuil fixé par voie réglementaire, qui ne peut être supérieure à 800 grammes. Les fabricants sont donc dorénavant tenus à une obligation d'enregistrement des drones par voie électronique, permettant une meilleure traçabilité des engins. Cette obligation d'enregistrement fait échos à celle instaurée similairement aux Etats-Unis qui ont rendu obligatoire l'enregistrement de tous les drones de masse supérieure à 250 grammes.
La loi introduit également l'obligation pour les fabricants ou importateurs de drones, ainsi que pour les vendeurs d'occasion, d'inclure « dans les emballages de leurs produits ainsi que dans les emballages de leurs pièces détachées une notice d'information relative à l'usage de ces aéronefs » (article 3 de loi). Cette notice d'information devra rappeler les principes et règles à respecter quant à l'utilisation des drones, permettant ainsi une meilleure sensibilisation des utilisateurs de drones quant à la sécurité et aux règles en vigueur.
D'autant que la loi instaure également une obligation de formation des utilisateurs visant « à permettre le contrôle de l'évolution des aéronefs circulant sans personne à bord, en sécurité et dans le respect des règles et des conditions d'emploi relatives à la navigation aérienne ». Cette obligation de formation est obligatoire pour les drones dont la masse est supérieure à un seuil fixé par décret (ne pouvant dépasser 800 grammes). Les spécificités de la formation seront précisées prochainement par voie réglementaire.
L'instauration de ces différentes règles vise essentiellement à prévenir les usages indésirables et renforcer la sécurité de l'usage des drones civils.
Dans une même optique, une autre mesure introduit la mise en place de dispositifs de sécurité concernant les drones d'une certaine masse fixée par décret (ne pouvant excéder 800 grammes). En effet, l'article 4 de la loi nouvelle introduit une obligation d'équipement de chaque drone d'un dispositif de signalement lumineux et électronique d'une part, et d'un dispositif de signalement sonore d'autre part. Ce dernier devra se déclencher en cas de perte de contrôle de l'appareil ou de la maîtrise de la trajectoire de l'appareil par le télépilote. De plus, ces engins devront être dotés d'un dispositif de limitation de leurs capacités.
Sont cependant exemptés de ces modalités, les drones opérant dans un cadre agréé et dans des zones identifiées à cet effet.
Afin de permettre aux fabricants d'intégrer ces nouveaux dispositifs, ces normes s'appliqueront aux nouveaux drones à partir du 1er juillet 2018. Concernant les drones enregistrés ou immatriculés avant le 1er juillet 2018, les nouvelles normes précédemment énoncées ne s'appliqueront qu'à compter du 1er janvier 2019.
Enfin, la loi consacre des sanctions en cas de survol par les drones d'une zone interdite française. En effet, dorénavant, le fait pour un télépilote de faire survoler « par maladresse ou négligence », par un drone, une zone non autorisée (telle qu'énoncée à l'article L6211-4 du Code de transports) est puni de six mois d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende (article 5 de la loi). La loi introduit ainsi un véritable délit de survol par maladresse ou négligence d'une zone interdite, visant à dissuader les usages illicites. Mais une peine allant jusqu'à un an d'emprisonnement et 45 000 euros d'amende est également possible pour un télépilote qui engage ou maintient un drone au-dessus d'une zone interdite ou ne se conforme pas aux dispositions de l'article L6211-4 du Code des transports relatif au survol de certaines zones interdites du territoire français.
Une peine complémentaire de confiscation du drone est également prévue en cas de condamnation du télépilote pour l'une des infractions mentionnées ci-dessus ou de l'infraction prévue à l'article 223-1 du Code pénal[2].
Par l'adoption de cette nouvelle loi, les utilisateurs de drones seront désormais fortement informés des règles en vigueur et dissuadés de survoler des zones interdites avec leurs drones. La loi permet l'instauration d'une meilleure traçabilité des engins par l'immatriculation et l'enregistrement mais introduit également de nouveaux dispositifs visant à rendre l'utilisation des drones plus sécurisée pour éviter tout incident. Sont ainsi concernés non seulement les usagers des drones mais aussi les fabricants. Au premier abord, les nouvelles mesures introduites semblent efficaces, reste à voir si en pratique elles le seront vraiment et préviendront des usages indésirables.
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[1] Arrêté du 17 décembre 2015 relatif à la conception des aéronefs civils qui circulent sans personne à bord, aux conditions de leur emploi et aux capacités requises des personnes qui les utilisent (NOR : DEVA1 528 542 A) et arrêté du 17 décembre 2015 relatif à l'utilisation de l'espace aérien par les aéronefs qui circulent sans personne à bord (NOR : DEVA1 528 469 A)
[2] Article 223-1 du Code pénal : « Le fait d'exposer directement autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente par la violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende ».