Rapport d'activité 2021 de l'AFA : des lacunes méthodologiques à l'origine de la plupart des manquements relevés
Malgré les efforts des entreprises pour se conformer aux exigences la loi Sapin 2, les programmes anticorruption déployés restent dans leur grande majorité qualitativement insuffisants.
L'Agence Française Anticorruption (l' « AFA »), service à compétence nationale créé par la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 (la « Loi Sapin 2 »), vient de rendre son rapport d'activité 2021.
L'analyse des contrôles qu'elle a diligentés sur les acteurs économiques (i.e., entreprises du secteur privé ou concurrentiel) permet notamment de tirer quelques enseignements simples.
L'AFA constate en premier lieu un progrès quantitatif : sur 34 contrôles d'initiative qu'elle a diligentés en 2021 et concernant des acteurs économiques, 25 se sont traduits par l'absence de tout manquement à l'obligation de mise en place et de déploiement des procédures et dispositifs prévus par l'article 17 de la Loi Sapin 2. Les 9 contrôles restants ont, pour leur part, révélé divers manquements relatifs à l'inexistence pure et simple, soit d'une cartographie des risques (2 cas), soit d'un dispositif d'évaluation des tiers (6 cas), soit encore d'un dispositif de formation destiné aux cadres et aux personnels les plus exposés (1 cas).
En revanche, l'AFA constate des lacunes majeures d'un point de vue qualitatif. Dans une très large majorité des entreprises contrôlées, la qualité et l'efficacité des mesures et procédures mises en place se sont révélées insuffisantes, en particulier pour ce qui concerne :
- 85 % des cartographies des risques ;
- 67 % des processus d'identification des personnels les plus exposés et des contenus des formations anticorruption ;
- 91 % des dispositifs d'évaluation des tiers ;
- 92 % des mesures de suivi et de contrôle du dispositif anticorruption ; et
- 100 % des contrôles comptables.
Ces chiffres montrent que les entreprises contrôlées ne sont pas parvenues à convaincre l'AFA de la pertinence et de l'efficacité des mesures qu'elles ont mises en place malgré leur volonté de se conformer.
Les manquements relevés concernent, de fait, les procédures nécessitant l'adoption de méthodologies rigoureuses et cohérentes pouvant être défendues devant l'AFA sur des bases rationnelles et logiques.
En particulier, l'élaboration de la cartographie des risques (comme celle de la procédure d'évaluation et de suivi dans le temps) requiert l'adoption d'une approche quasi-scientifique. Les options méthodologiques retenues comme le choix des variables mathématiques doivent être non seulement documentés mais également expliqués en fonction de critères objectifs. La cohérence globale du système mis en place et l'identification précise des particularités propres à l'entreprise concernée (secteur d'activité, zone géographique, gouvernance, etc.) seront autant d'arguments pertinents à présenter en cas de contrôle de l'AFA.
L'AFA rappelle qu'elle dispose d'une équipe pluridisciplinaire composée d'agents aux profils variés issus tant de la fonction publique que du monde de l'entreprise, et notamment, des magistrats, des ingénieurs et des experts dans le domaine de l'audit. Si l'entreprise veut se faire comprendre de l'AFA, elle doit pouvoir parler le même langage et maîtriser à la fois le vocabulaire du droit et celui du chiffre.